jeudi 26 février 2009

CHAN, une CAN au rabais?

Cette nouvelle compétition est un aveu d'impuissance : les stars africaines du foot retournent de moins en moins souvent au pays montrer leur talent.

Vous avez admiré avant-hier les dribbles de Kader Keita lors d'OL-Barça? Et vous avez vu hier le but de Didier Drogba pendant Chelsea-Juventus? Les fans Ivoiriens eux aussi vibrent toutes les semaines, devant leur télé, aux exploits de leurs meilleurs joueurs nationaux expatriés en Europe... Mais ils n'ont que très rarement l'occasion de les voir en vrai sur un stade... Les stars africaines du football retournent de moins en moins souvent au pays natal montrer leur talent.

On le sait, le foot africain, par manque de rentabilité, est le parent pauvre de la FIFA. Les fédérations africaines de football n'ont même plus les moyens de convoquer leurs joueurs nationaux au pays pour des matchs de préparation... Depuis plusieurs années, les matchs amicaux des équipes nationales africaines ont lieu en Europe! Comprenez le bien : les clubs européens qui possèdent des stars africaines n'ont pas envie de les voir partir plusieurs jours pour un long périple en avion et de les voir courir sur des pelouses de qualité très moyenne où le risque de blessures est accru.

Ce mouvement de délocalisation des matchs amicaux des équipes nationales n'est pas propre aux sélections africaines : les équipes d'Amérique latine, de plus en plus elles aussi, jouent leurs matchs amicaux en Europe... Mais dans leur cas, c'est plus subtil : il s'agit d'affronter des équipes nationales européennes à l'extérieur (France – Equateur et plus récemment France – Argentine au Stade de France).. Dans le cas de l'Afrique, la délocalisation des matchs amicaux en Europe est totale : même les matchs amicaux entre sélections nationales africaines ont lieu en Europe. Par exemple, c'est au stade Robert-Bobin de Bondoufle (91) que le Cameroun a battu la Guinée le 11 février dernier, en match préparatoire des prochains éliminatoires CAN-Coupe du Monde. Eto'o à Bondoufle, ça valait le déplacement!

Alors pour lutter contre la raréfaction des matchs internationaux sur le continent africain, la Confédération Africaine de Football (CAF) a eu l'idée de créer une nouvelle compétition : le CHAN, le Championnat d'Afrique des Nations. Son originalité : faire s'affronter des équipes nationales composées exclusivement de joueurs évoluant dans un club de leur pays! Aucun expat', que des locaux! Des équipes B en quelque sorte, composées de joueurs restés au pays. La première édition de le CHAN a lieu actuellement en Côte d'Ivoire. Issa Hayatou, le Président de la CAF, et le Président Gbagbo, l'hôte du championnat, répètent que cette nouvelle compétition présente la vivacité du football d'Afrique tel qu'il est pratiqué toutes les semaines sur les stades du continent. L'idée est intéressante. Il est vrai qu'avec l'expatriation de plus en plus précoce des stars africaines de football, le foot africain, comme le foot yougoslave ou le foot sud-américain, a tendance à perdre sa spécificité, sa «culture»... Le style de jeu, à l'échelle mondiale, est de plus en plus uniformisé. Une compétition comme le CHAN pourrait permettre de revitaliser un football africain «endogène» et de valoriser un style de jeu local éloigné des consignes standardisées des grands clubs européens...

Mais ne rêvons pas, le CHAN ne passionne pas grand monde... L'engouement des Ivoiriens est assez limité... Seuls 5000 spectateurs ont assisté à Bouaké aux matchs Ghana–Zimbabwe et RDC-Lybie. Et le mauvais résultat des Eléphants en match d'ouverture (défaite 3-0 face à la Zambie) n'arrange pas les choses...

Alors ce CHAN a-t-il un avenir? Espérons le, mais ce n'est pas sûr... Cette compétition, aussi louable soit elle, est d'abord un aveu d'impuissance : pâle succédané de la CAN, le CHAN confirme un peu plus que la migration des stars africaines du football est un phénomène durable.
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mercredi 18 février 2009

Lagardère : main basse sur le sport français

En bon industriel, Arnaud Lagardère cherche le contrôle de l'ensemble de la filière : athlètes, clubs, compétitions, paris, droits télé, médias sportifs, rien ne lui échappe.

C'est bon d'avoir un ennemi... Un qu'on déteste, un dont on souhaite ardemment la chute... Mon Alter-Ennemi, c'est Arnaud Lagardère. Son Groupe vient d'annoncer ses résultats 2008 : chiffre d'affaires en hausse de 3,1%, c'est pas la crise pour tout le monde... Mais l'activité de la filiale Lagardère Sports, d'une valeur de 444 millions d'euros, a baissé quant à elle de 5,2%... Le début de la fin d'un empire sportico-médiatique?

Arnaud Lagardère incarne aujourd'hui en France la collusion de la politique, du business et des médias. Marchand d'armes avec EADS, patron de presse avec Hachette, l'ami du Président s'efforce également de développer un empire du sport-spectacle. Alors comme on ne combat jamais aussi bien son ennemi qu'en le connaissant dans ses moindres détails, je vous propose une présentation détaillée de Lagardère Sports...

D'abord, le very famous Team Lagardère : bon... dans le monde du tennis, la Star Ac' de Lagardère Sports ne fait plus vraiment peur à personne... La crise de confiance de Richard Gasquet semble avoir contaminé l'ensemble du Team, même si la gentille Alizée Cornet s'impose peu à peu comme la numéro 1 tricolore... Chez les hommes, Tsonga et Gilles Simon, les deux locomotives françaises du moment, roulent pour la Fédération Française de Tennis (FFT), pas pour Lagardère... Je n'ai pas une passion particulière pour la FFT, un repaire de vieux requins soupçonnés de manigances diverses, mais dans la lutte d'influence que se livrent le Team Lagardère et la Fédé, je soutiens la Fédé sans hésiter. Si vous allez à Roland-Garros cette année, applaudissez donc des deux mains Simon, Montfils et Tsonga et sifflez discrètement Cornet, Gasquet et Llodra. (Je sais, je ne fais pas dans la dentelle sur ce coup là...).

Autre gros poisson dans l'escarcelle de Lagardère : le Racing. Soumis à un lobbying intense, Bertrand Delanoé a laissé l'industriel s'accaparer le vieux club aristo de la capitale et son country-club de prestige, le Pré Catelan. Résultat, Lagardère possède maintenant une belle écurie d'escrimeurs, de judokas, d'athlètes, de pentathlètes... Pleins de sportifs propres sur eux et à fort potentiel olympique! Modernisation des installations sportives, recrutement des meilleurs entraineurs, les sportifs du Lagardère-Racing sont traités comme des coqs en pâte. Ils ont même accès à une formation universitaire sur mesure à Sciences Po pour préparer leur reconversion!

Très bien, très bien, me direz-vous... Que peut-on donc reprocher à ce mécène de Lagardère? Eh bien, de mélanger les genres... Car l'investissement de Lagardère dans le sport est avant tout financier... De nombreuses sociétés sportives à but lucratif sont en effet rattachées au Groupe. Jugez sur pièces :
- Sportfive - Cette société chargée de faire de la surenchère sur les droits de retransmission des compétitions sportives est l'un des piliers de la bulle spéculative du sport pro! Félicitations!
- Sport4Fun - Ce charmant site de pronostics gratuits sur le sport n'attend qu'une chose : l'autorisation des paris sportifs sur Internet, qui sera donnée par Bernard Laporte dans quelques mois... En attendant, Sport4Fun se constitue un fichier de futurs parieurs...
- Sport.fr, Football.fr - Ces sites d'infos sur le sport sont plutôt bien faits mais rassurez-vous, ils ne mènent pas d'enquêtes, ils ne font que mettre en scène les exploits des sportifs français... On est ici dans l'hagiographie sportive, pas du tout dans le journalisme sportif... Utile le cas échéant pour faire remonter la cote des sportifs maison...
- Le Tour d'Allemagne de cyclisme, l'Open de Suède de tennis – Le Groupe Lagardère fait ici double emploi : il organise ces compétitions importantes et il y fait participer les sportifs qui sont licenciés dans ses clubs! Comme si le PSG était l'organisateur de la Coupe de France! J'ai bien peur que ce genre de conflit d'intérêts évident ne choque plus personne...

On pourrait continuer longtemps la liste des bonnes oeuvres de l'Empire Lagardère qui bouleversent de près ou de loin le paysage sportif français. Que faut-il en retenir? Qu'Arnaud Lagardère contribue largement à la privatisation du sport. En bon industriel, il fait main basse sur l'ensemble de la filière : athlètes, clubs, compétitions, paris, droits télé, médias sportifs, rien ne lui échappe.

Lagardère-père (Jean-Luc), patron émérite des années 80, avait été fort peu chanceux avec le sport : son Matra-Racing avait fait long feu. Souhaitons à Arnaud, sur ce coup là, de marcher sur les traces de son père!

PostScriptum : jeudi 19 février 10h : en relisant ce matin mon article sur Lagardère, je le trouve par moments un peu de mauvaise foi... Quoi? Ce mal caractéristique du sport pro m'aurait-il déjà atteint? Aaaaargh!
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dimanche 15 février 2009

L'AlterFlyer


Le voilà le flyer AlterSport... A enregistrer, imprimer et diffuser dans les Fédés, dans les CREPS, à l'Equipe, à Clairefontaine, au siège du CIO, sur les terrains de pétanque, à la piscine, à Old Trafford, au Maracana, à Twickenham, chez So Foot, à Lillehammer, chez Lagardère, à Saint-Andrews, au secrétariat de la Jeunesse et des Sports, à la FIFA, au Marathon de New York, à Athènes, à Stade 2, où sais-je encore! Lire la suite...

lundi 9 février 2009

Circuit F1 en Ile-de-France : le combat continue

Ah, une petite victoire, ça fait du bien... Les députés viennent d'annuler un amendement sénatorial particulièrement scandaleux... Car avec son catalogue à la Prévert de 1000 mesures pour la relance, Fillon pourrait nous faire avaler n'importe quoi... comme par exemple la construction express d'un circuit F1 en région parisienne.

On a en déjà parlé à plusieurs reprises dans ces colonnes : Bernie Ecclestone, Arnaud Lagardère et Alain Prost complotent entre amis pour mettre Magny-Cours sur la touche et avoir les coudées franches pour faire construire un circuit
F1 tout beau tout neuf en Ile-de-France, une mesure totalement Grenello-incompatible, mais peu importe! Fillon a un petit faible pour les Yvelines, dirigés par son ami UMP Pierre Bédier, et le projet situé à Flins (78) a donc toutes les faveurs du gouvernement.

Alors le Premier Ministre a chargé un sénateur UMP des Bouches du Rhône, en plein débat sur le plan de relance, de voter, tard le 23 janvier, l'amendement n°85 suivant: "Aux fins de l'exploitation d'un circuit automobile homologué pour la formule 1, il peut être passé une convention d'occupation temporaire du domaine public comportant des obligations de service public fixées par la personne publique". En clair, un amendement qui permet d'accélérer les procédures de construction d'un nouveau circuit F1... un amendement, comme le révèle L'Express.fr, taillé sur mesure pour Flins, en concurrence, sur ce dossier avec Sarcelles et Magny-Cours...

Heureusement, des députés de la Commission paritaire mixte de l'Assemblée Nationale ont senti l'entourloupe et ont rejeté l'amendement. Il faut dire que la fronde des riverains du tracé, menée aux sons de "La Formule 1, ça sert à rien", est plutôt efficace. "Flins sans F1" vient donc de gagner une première bataille... mais pas la guerre... rien n'est encore joué...


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jeudi 5 février 2009

Plafonnement des salaires, yes oui cannes

Les subventions octroyées par les collectivités locales aux clubs de foot doivent être conditionnées à la mise en place d'un salary cap.

Il est trop fort cet Obama, hop, il profite de son "état de grâce" pour plafonner à 500 K$ annuels le salaire des chefs d'entreprises bénéficiaires du plan anti-crise... Et tout cela en deux temps trois mouvements, bien joué Barack.

Alors, quand allons-nous enfin plafonner les revenus des sportifs professionnels? Reprenons l'argument d'Obama : l'argent du contribuable américain ne doit pas servir à engrosser des dirigeants d'entreprise déjà multi-millionnaires. Cet argument est tout aussi valable dans le sport pro, et dans le foot français en particulier. Les clubs bénéficient de mannes d'argent public, notamment pour la formation de leurs joueurs et pour l'aménagement de leurs stades. Par exemple, la ville de Paris donne chaque année plus de 2 millions d'euros au PSG... Ce n'est pas rien! Alors en ces temps de vaches maigres, il serait immoral de ne rien faire contre l'indécente inflation salariale dans des clubs en partie financés par l'argent public.

Outre-Manche, les footballeurs professionnels dépassent largement le plafond obamesque : la moyenne des revenus, en Premier League, est de 150.000 € par mois! En France, parent pauvre du foot européen, un joueur de Ligue 1 gagne en moyenne "seulement" 47.000 € par mois. Quelle misère! L'UNFP, le syndicat des joueurs français, a beau crier famine, les Français ne s'y trompent pas : 78% d'entre eux, dans un sondage publié par Le Parisien la semaine dernière, estiment que les joueurs de Ligue 1 sont trop payés.

Alors, quelle riposte prépare notre gouvernement? Un plafonnement des salaires de Ligue 1, un salary cap à la française? Eh bien, on sent Laporte et Fillon un peu gênés aux entournures. Parce qu'ils se sont précisément battus, ces dernières années, pour alléger les charges sociales pesant sur les salaires des footballeurs français. En introduction du rapport Besson sur la compétitivité du foot français, en fin d'année dernière, le Premier Ministre écrivait ainsi : "Le coût global des rémunérations des meilleurs joueurs est supérieur en France à celui de l'Angleterre, l'Italie, l'Espagne et l'Allemagne, du fait de notre structure de prélèvements obligatoires. Grâce au dispositif du Droit à l’Image Collective (DIC), que nous vous recommandons de pérenniser, et aux récentes évolutions de la législation fiscale sur les revenus et sur le patrimoine, cet écart défavorable s’est réduit pour se limiter à environ 15 % pour une rémunération "moyenne" comparée aux systèmes sociaux et fiscaux de nos principaux concurrents". Manque de pot, un rapport de la Cour des Comptes, cette semaine, compare le DIC à une "niche fiscale" qui a "donné des résultats peu probants". En clair, le DIC est une mesure inéquitable et inefficace!

Toujours Fillon dans le texte : "Si vous le décidiez, une étude qui porterait sur le coût et l’opportunité d’un étalement du paiement de l’impôt sur le revenu tenant compte de la brièveté de la carrière des footballeurs professionnels pourrait cependant être conduite". Ben voyons, un nouvel aménagement fiscal pour les stars du foot, il ne manquerait plus que cela!

Certes, notre gouvernement, du bout des lèvres, se dit partisan d'un salary cap qui plafonnerait le ratio "masse salariale/chiffre d'affaires" des clubs, comme c'est le cas aujourd'hui en rugby dans le Top 14... Mais pour ce qui concerne le foot, affirme le rapport Besson, cette solution ne pourrait être qu'européenne... Et si l'UEFA a bien un projet dans ses cartons, la Commission européenne freine des quatre fers! Bref, le salary cap européen, c'est pas demain la veille.

Alors, faisons franco-français, simplement et sans atermoiements. Et puisque l'Etat ne fera rien, peut-être que les mairies et les régions, importants bailleurs de fonds des clubs de foot pro, auront le courage d'exiger des comptes. Les subventions octroyées par les collectivités locales aux clubs de foot devraient être gelées jusqu'à la mise en place d'un plafonnement des revenus des joueurs de Ligue 1. Soyons obamesques, directs, efficaces. Yes oui cannes.

PS : Le site web de référence sur le foot et les finances, c'est un site portugais très bien fait, Fuetbol Finance. Ils ont publié aujourd'hui leur nouvelle liste des joueurs les mieux payés. En tête à égalité : Kaka et Ibrahimovich, avec un revenu annuel de 9 millions d'euros ; premier Français : Thierry Henry, avec 7,5 millions ; joueur de Ligue 1 le mieux payé : Karim Benzema 4,5 millions.
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